Carte postale
Il fallait donc attendre cette deuxième quinzaine de juillet (une fois passé le carnaval règlementaire, et donc imbécile, de la fête nationale) pour que les vacanciers privilégiés se résolvent enfin à déserter la capitale ! Et les sacro-saintes vacances estivales de livrer Paris aux touristes et aux épaves désargentées, tandis que bien loin des quais du RER, les Franciliens abominables goûtent béatement aux loisirs de la côte (d’Azur ou d’Opale, selon leur budget) dans une ambiance guillerette, et néanmoins caricaturale, digne des Vacances de monsieur Hulot.
Mais que sont devenues nos cartes postales d’antan ? Cette manie désuète de s’adresser par la poste quelques phrases griffonnées à la hâte, dont la futilité désinvolte n’a d’égale que la platitude, semble bel et bien en voie de disparition. Eh oui, car en cette triste époque d’e-mails à tout bout de champ (pour un oui, pour un non) et de SMS laconiques, on ne s’envoie plus guère de ces petits rectangles de papier cartonné (15 x 10 cm) aux illustrations si pittoresques… Et nous ne pouvons que songer avec nostalgie aux premières décennies du XXème siècle, cet âge d’or de la carte postale.
Entre autres raisons de perpétuer cette tradition épistolaire, en voilà une qui explique pourquoi la réception d’une carte postale s’accompagne toujours d’un petit frisson de bonheur : quelles que soient les circonstances, le message que porte son texte dénote nécessairement un optimisme déconcertant… Car même s’il est dévoré d’angoisse, miné par la dépression, parfaitement dégoûté de la vie (voire au bord du suicide), votre correspondant ne manquera pas de vous écrire qu’« il fait un temps splendide » et qu’il « passe des vacances de rêve ! – Bon souvenir de, etc. ».
Esquissons donc la conclusion que telle est la magie de la carte postale, qui donne raison au pathétique Aznavour : « la misère serait moins pénible au soleil »…
Et j’attends de pied ferme le petit plaisantin qui, par esprit de contradiction, aura l'audace de m’adresser un mot de ce genre :
Bons baisers de partout!