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La tête de l'art
12 mai 2013

La cruche à l'eau

Jean-Baptiste Greuze (1725-1805)

La cruche cassée

1771, Musée du Louvre, Paris

Jean-Baptiste_Greuze_002

Que n’a-t-on pas raconté sur cette pauvre fille ! Humiliée, outragée, sa virginité perdue, son regard vague et désabusé, perdu dans le vide, etc. Encore une victime de la violente domination machiste. La cruche cassée qu’elle porte à son bras droit, métaphore triviale de son hymen rompu… J’aime autant vous annoncer la couleur tout de suite : non seulement je vais abonder en ce sens, mais je vais encore en rajouter plusieurs couches (et pas seulement dans le sens de l’interprétation officielle).

Regardez mieux : voyez déjà le visage poupin de cette innocente nymphette posé sur le corps d’une femme mûre. Comme si l’artiste avait voulu exprimer toute la perversité de l’adolescente déjà plus que nubile et provocatrice. Et qui nous dit finalement si cette petite garce vicieuse n’était pas consentante ?... En voilà une dont on peut dire, en tout cas, qu’elle a cessé de goûter « l’horreur d’être vierge », pour introduire une note mallarméenne.

Jean-Baptiste_Greuze_004

La fontaine sculptée en forme de lion, symbole probable de la brutalité du mâle agressif et incontinent, affiche néanmoins des paupières en accent circonflexe (post coïtum animal triste), exprimant peut-être le désarroi de l’amant éconduit, vaincu, « saccagé par la griffe et la dent féroce de la femme » (Baudelaire) ; tandis que l’ornement architectural en forme de tête de bélier renvoie au satyre lascif antique ou encore (plus prosaïquement) à l’un des nombreux avatars du diable lubrique.

Comble de l’ironie (ou du mauvais goût) : la rose à moitié effeuillée, passée en travers de sa poitrine dénudée, semble garder le souvenir amer d’un désir assouvi, et qui triomphe tristement au-dessus de la brassée d’œillets roses et blancs (symboles d’amour et de fidélité conjugale) qu’elle tente maladroitement de retenir dans la candeur fanée de son vêtement, comme autant de chastes baisers.

Pour terminer, et ce n’est certes pas mon psychanalyste qui me donnerait tort, le cadre ovale du tableau n’est pas sans suggérer la forme de l’orifice vaginal…

Bonne nuit, les petits.

 

 

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Commentaires
Y
En fait, la cruche cassée n'évoque pas à une « castration » de la femme qui n'a pas de … euh… vous savez quoi… mais à la mort narcissique impliquée par le viol (indépendamment du sexe de la victime).
Y
Je ne vois aucune allusion à un complexe de castration cher à ce tordu de Sigismund Freud. Qu'y aurait-il de différent, dans l'expression de la victime, si elle était un garçon au lieu d'être une fille ?<br /> <br /> <br /> <br /> Le développement sur le langage des fleurs me semble erroné : hormis la rose qui, fleur de Vénus, peut depuis l'Antiquité évoquer l'amour (surtout charnel), les autres fleurs n'ont une signification amoureuse, à ma connaissance, que depuis le XⅨe siècle.
G
donc Freud et sa théorie sur le complexe de castration féminine et masculine avait vu juste.Il ne s"agit pas seulement de l'hymen défloré. Je suggère, tout de même, à l'égard de la fille du père et du fils de la mère de faire montre de délicatesse et d'être moins brutal que les théories freudiennes car dans la vraie vie les héros mythiques n"existent pas.
M
Ah ce cher Greuze! J'ai lu beaucoup à son sujet dans le bouquin sur Fragonard de Sophie Chauveau. Ils vivaient en même temps au Louvre avant la révolution... Il parait que sa femme avait la jambe très légère et qu'il était très cocu le pauvre Greuze... Va savoir... Je te conseil le bouquin si tu ne l'as pas déjà lu.
S
Ho j'espère vraiment qu'elle n'est plus vierge, qu'elle a passé sa nuit précédente dans les bras d'un amant qui lui a fait connaître le 7ème ciel, qu'elle n'a qu'une envie: de se débarrasser de ce maudit peintre pour aller le rejoindre ou mieux encore qu'il en finisse vite avec ce tableau commandé par son père afin qu'elle puisse tomber dans les bras de son peintre préféré qui lui fera voir toutes les couleurs de l'arc en ciel
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